Social

Complot

Le complot et la théorie du complot sont l’exact reflet d’une société de la transparence et de la traçabilité. Une société industrielle en somme. C’est une manière de faire récit, là où il n’y en a plus, là ou il n’y a que des fonctions.


Les théories du complot s’établissent sur des coïncidences. Celles-ci sont rendues possibles non pas sur la base des faits, mais en raison de la nature symbolique des faits. Le fait en tant qu’événement a lieu de manière symbolique. C’est parce que notre langage recouvre les faits d’un voile symbolique que l’on peut mettre les événements si facilement en parallèle. C’est bien parce que 2001 Odyssée de l’espace de Kubrick est un film à grande valeur sémiologique, il se fonde en effet sur un pur régime de signes, que l’on peut s’interroger sur la réalité de la conquête lunaire par la Nasa. C’est parce que son fameux monolithe apparait comme un pur signe dans le film que l’on s’interroge également sur la chute du WTC en 2001.
Dés lors ces signes ont un potentiel multiple. Un potentiel multiple d’interprétation, et à ce titre il faut comprendre la réalisation des événements sur le plan des signes et des symboles.


Foot

Faisons l’hypothèse qu’être français, c’est parler français. Admettons alors que parler français c’est produire du sens et du non sens. Mettre en œuvre la langue, quoi !
Hé bien, ce qui ressort de cette équipe de France, c’est sans nul doute des hommes, blancs, noirs, bronzés, pris par le jeu de cette langue. D’aucun ne pourrait leur retirer cette joie d’avoir pratiqué leur langue comme en témoigne les jeux de mot, les sobriquets, les chansons, les calembours et les saynètes comiques auxquels se sont adonnés les joueurs. On aura bien compris que la langue de bois légendaire des footballeurs est un leurre journalistique qui cache un véritable plaisir du langage.
Voilà ce qui a fait la force de cette équipe de France bien plus sans doute que sa technique sportive. Et cela les équipes favorites ne l’ont pas compris. Et les racistes non plus.
Le génie français durant ce mondial est d’avoir su minimiser le savoir technique pour privilégier un vivre ensemble conditionné par le plaisir du langage.
Comme il appartient à n’importe qui de tirer parti de la langue française d’où qu’il vienne, La question de l’origine demeure une approche stérile. Le raciste, comme les identitaires en vrais paranoïaques, n’obtiendront jamais satisfaction car le critère de la langue, fluide, immatériel dépasse les théories du sol, de la race et de la généalogie.


Politique du foot

Quand l’intelligence artificielle s’impose comme une nouvelle norme, le sport s’avère un laboratoire éclairé des problématiques politiques à venir.

La présence de la machine informatique dans les rouages de la décision est significative du rapport de notre société à l’autorité.
La VAR au foot par exemple est aussi discutable que la perception purement humaine. La VAR joue en effet sur des échelles infimes qui ne sont pas en accord avec la perception des joueurs, ni avec l’échelle du jeu et de ses limites elles-même. Un ‘hors jeu’ par exemple peut se déterminer au centimètre près grâce à l’acuité numérique. Si bien que même le VAR montre parfois des limites à ce niveau de détail. Un doigt, un bout de pied doit-il compter pour le hors jeu ? Et dans le doute de la capture vidéo, c’est en définitive encore à l’arbitre qu’il revient de trancher. La VAR ne fait que nourrir le spectacle en dramatisant par l’image une prise décision qui n’est pas meilleure qu’avant. Les fautes critiques restent critiques, VAR ou pas. La VAR ne répond pas à un problème d’acuité, parce que son échelle d’analyse des événements ne correspond pas à la réalité physique des corps et du cadre sportif (terrain, ligne de touche). La VAR subdivise le temps et l’espace à un point tel qu’elle dénature l’événement même et qu’elle transforme les intentions du joueur systématiquement en faute. Le millimètre et le pixel sont des échelles absurdes en sport. En réalité, au foot comme au rugby tout est fait pour qu’un arbitre et ses juges de touche expérimentés maitrisent le jeu.

Mais même si rien n’échappait à l’expertise numérique, même si elle faisait la lumière totale sur les événements, la VAR introduit une autre forme d’autorité qui repousse le rôle de l’autre dans la décision.
La VAR c’est préférer l’injustice des appareils, plus tolérable que l’injustice humaine. Une décision supérieure est souhaitée. À l’heure de la télécommunication généralisée, il devient difficile de supporter la chair (et c’est le paradoxe du sport), de supporter les erreurs d’un autre humain, ses doutes, ses hésitations. On comprend à ce titre que les hommes désirent une autre expérience politique.
Or confier la politique aux appareils de calcul, aux statistiques même, entame deux dimensions humaines importantes :
La dimension collective d’abord. À plusieurs il est pourtant possible sur de nombreux sujets de décider aussi bien qu’un ordinateur seul, voire mieux et pour le mieux. Thèse communément appelée « sagesse des foules. »
Puis la dimension du langage qui est alors disqualifié du dispositif numérique. La statistique comme expression de formes collectives s’impose dans le management dominant et comme valeur d’avant garde. Dés lors qu’elle s’incorpore à un dispositif numérique, la statistique relève du domaine de la croyance car l’une des tendances du dispositif est de faire croire sans que rien de son processus ne soit vérifiable. Google fonctionne bien, mais l’on ne peut rien en savoir ou peu.

On fait trop souvent appel à la technique et aux techniques numériques en particulier, alors qu’il s’agit de renommer les choses pour résoudre les problèmes.
À la base, il y a souvent un problème de langage.
Dans le cas du foot, si l’autorité de l’arbitre pose problème, ce n’est pas forcément en raison de sa fonction, de son rôle sur le terrain, c’est d’abord parce qu’il n’est pas bien nommé. En sa qualité d’homme et de sportif, l’arbitre est un joueur comme un autre. Dans un cadre politique classique, c’est-à-dire celui de la parole et de la décision, l’arbitre fait office de 23ème joueur. Il est impliqué dans le jeu et sert à faciliter la prise de décision. Sur le terrain l’arbitre court, sue, s’engage et à ce titre, il est l’égal des joueurs et comme eux il commet des fautes, des maladresses et des erreurs. Il a des doutes. C’est sa propre perception qui devrait être valorisée sachant que les deux arbitres de touche sont là pour l’épauler.
Plutôt que d’abandonner cette part humaine, pleine de faiblesses comme de courages… Il suffisait simplement de renommer l’arbitre plutôt que de favoriser une politique soumise à la technologie dont on devine qu’elle est vaine. Opter pour une technologie politique c’est reculer encore la possibilité de l’égalité dans la prise de décision.

Au sujet des limites du VAR sur le journal l’équipe. Article pdf


Au sujet de la magouille de Platini concernant le tirage au sort truqué du mondial 98.
Dans sa carrière institutionnelle, Platini poursuit une tradition politique. S’en remettre au tirage au sort (comme au VAR d’ailleurs), c’est déjà abandonner la politique à la cybernétique, c’est-à-dire abandonner les affaires d’homme dont la magouille est une des pointes extrêmes. C’est céder une part humaine au hasard et à l’aléatoire puis à la statistique qui ne sont que l’équivalent caché du programme informatique, de algorithme.


Racisme

Là où le raciste a tort, et tort de bêtise, c’est qu’il aura toujours un ‘autre’ à détester. Il y aura toujours un repoussoir pour calmer ses névroses. Le racisme est d’autant plus idiot sur un plan individuel qu’il est profondément institué. Le raciste ne prend aucune hauteur, aucun recul, il est mesquin. Quels sont les bénéfices aujourd’hui du racisme anti-maghrébins depuis au moins 60 ans ? L’islam, un islam bigot et parfois violent. Quelle réussite politique pour la France !
Prenons pour postulat que toute société a besoin d’un ‘autre’ pour fonder la communauté. Qu’est-ce qu’un état qui n’a pas d’ennemi, une société qui n’a pas d’étranger, une communauté qui n’a pas d’exclu ?
En revanche, l’anti-racisme peut conduire au pire, quand il consiste à accepter ‘l’autre’ sans condition, sans considération non plus pour ce fondement social auquel chacun est soumis.
D’une part parce que l’anti-racisme exerce une forme de culpabilité sur chacun au lieu de s’attaquer directement au fondement de la société et en cela le communisme rassembleur était une alternative à ce fondement discriminant de la société.
Puis parler « pour et à la place » des exclus comme l’ont fait de nombreuses années certaines associations anti-racistes est la marque d’une condescendance.
L’anti-racisme appuie son discours sur le racisme, il s’agit d’un racisme de second degré parce qu’il est pris dans les mêmes catégories que le racisme. L’expérience du mouvement Touche pas à mon pote, n’a jamais cessé d’en faire son fond de commerce.
Au fond l’anti-racisme des années 80 dont on sait qu’il fut instrumentalisé avec intelligence par le pouvoir en place, a rationalisé le racisme mieux que personne peut-être, car le racisme à la base est un discours incohérent. « J’aime pas les arabes sauf Momo mon gardien d’immeuble ». « Fatima, c’est pas pareil, elle, elle est bien ! » voici un échantillon typique du discours raciste en France. « Il zont ka rentrer chez eux – non, mais pas ceux qui sont déjà là » Discours incohérents. Or la rationalisation du racisme, on la doit autant (voire plus) à l’anti-racisme qu’à Le Pen. Il faudrait réécouter ses discours pour comprendre qu’il n’est pas pire que ceux prononcés par les politiques de droite depuis les années 90. La maîtrise du racisme nous la devons aux différentes associations dont certains membres se sont depuis partagés le pouvoir.

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